Saturday, June 24, 2006

CENSURE DE MONSEIGNEUR L’EVESQUE D’ALET.

Nicolas par mifericorde de Dieu Evêque d’Alet, à nos chers Freres, ls Recteurs, Vicaires, Confesffeurs & autres Ecclefiasfiques tans du Clergé que Reguliers, & à tous les fidelles de noftre Dio-cefe, Salut & Benediction. Un de nos principaux foins depuis qu’il a plû à Dieu de Nous appeler au gouvernment de ce Diocefe a efté de vous inftruire dans la connsoiffance, de la verité qui eft felon la pieté, comme parle Saint Paul, & dans les regles d’une morale Chrétienne & Evangélique, afin de vous preférever des opinions molles & relâchée de plufieurs Autheurs nouvau qui ne fon capable que de corrompre les mœurs des Chrétiens, & d’engager ceux qui les fuivent dans la voye large qui conduit à la mort, & d’autant qu l’ufure eft un des maux qui seftoit le plus repandû, foit à caufe des divers artifices dont ces Autheurs ont appris à la pallier, foit à caufe de la pente que les hommes y ont par propre cupidité, Nous nous fommes particulierement appliquez à vous propofer les Regles de l’Eglife fur ce point, à vous découvrir les divers pretextes dont on a accoufutmé de fe fervir pour les éluder, c’est pour cela que non feulment Nous avons fait traitter cette matière dans les Conferences Ecclefiafitiques & dans les inftuctions qui fe font aux Prônes des ffes de Parroiffe. Mais auffi Nous fifmes il y a quelques années publier un Monitoire generale dans tout nôtre dicocefe pour découvrir ceux qui étoint dans une fi mauvaife pratique : E dépuis dans nos vifites Epifcopales Nous vous avons toûjours exhortez à fuit ce vice, & âvertis les Rectuers & Confeffeurs de gerder exactement en ce point les regles de l’Elgife, pour l’adminiftration des Sacrements, ce fût dans ce méme deffein que le Livre de L’Apologie ds Cafuiftes ayant parû en l’année 1658. dans lequel l’Autheur entre autres maximes fuffes & erronée enfeigne à pratiquer l’usure, & fuggere divers moyens pour la pallier, Nous nous crûmes obligez d’en faire la Cenfure conjointement avec M. M. les Evêques de Pamies, de Comenge, de Bazas & de Conzerans, que la Providence divine avoit conduit icy, Nous étant conformez en cela à l’exemple de la Faculté de Theologie de Paris, & d’un grand nombre des plus celebres Prelats du Royaume, qui avaient déjà condamné le méme livre, cependant Nous avons appris depuis peu que non feulment on renouvelle les mémes maximes condamnées dans l’Apologie des Cafuiftes, mais qu’on les autorife par de nouveaux faifonnemens, & qu’on les porte méme plus loin qu’on n’avait ofé faire jufqu’à prefent, c’eft ce que nous avons remarqué avec beaucoup de douleur dans un libelle, qui a pour tître, De usu licito pecunia differtatio Theologica, compofé par un Religieux Minime de Tolose, & imprimé l’année derniere dans la méme ville, car l’Autheur de ce libelle pretend renverfer par un fimple raifonnement ce que l’Efcriture fainte & la tradition enfeignent touchant l’usure, & donner moyen à toute forte de perfonnes de tirer proffit des prêts, comme s’il n’y avoit qu’à changer le nom des chofes pour les rendre permifes & à inventer quelque raifon fpecieufe pour faire que ce qui eft deffendu devienne jufte & licite, ce qui eft la marque de ceux qui introduifent des erreurs contraires à la croyance de l’Eglife, felon cet avis que l’Apôtre donne à Timothée : Fuyez les nouveautez prophanes des paroles, & tout ce qu’oppofe une Doctrine qui porte fauffement le nom de fcience dont quelques uns faifant profefsion fe font egarez de la foy, & néanmoins afin que le poifon de cette Doctrine fe repandit plus aifement, non feulement on a fait imprimer ce libelle à Tolofe pour être de là envoyé dans tous les lieux des Provinces voifines : mais on à encore eu foin de la traduire & de le faire imprimer en François afin de le mettre entre les mains de tous le monde, de forte qu’il femble que par la publication de cet ouvrage on ait eu deffein d’étouffer tous les remords de confcience des Usuriers, & apprendre aux hommes à violer fans craintes les faints Canons de l’Eglife, & les Ordonnances de nos Roys très-Cheftiens fur cette matiere : c’eft pourquoy voulant prevenir les mauvais effects, que ce vivre pourroit caufer dans noftre Diocefe & empêchcer qu’on ne s’en ferve pour autorifer les Usures dont nous avons tâché de fire connoître l’injuftice & d’abolir la pretique, NOUS avons condamné & condamnons ledit libelle qui a pour tître De usu licito pecunia differtation Theologica actore R. P. F. Emmanuele Maignan Ordinis Minimorum sacrae Theologia Profeffore, comme contenant une Doctrine erronée, temeraire & fcandaleufe & comme donnant moyen à toutes fortes de perfonnes de commettre l’Usure, défendant expreffement à tous les fidèles de nofre Diocefe de lire, retenir, vendre ou debiter ledit Livre, & à tous Recteurs, Vicaires & Ecclefiaftiques, d’enfeigner & fuivre la Doctrine qui y eft contenue, le tout fous les peines de droit. Donné à Alet le fecond jour de May 1674.
NICOLAS Evefque d’Alet figné.
Par Monfeigneur,Dujeon Secretaire auffi figné.